Des anabaptistes issus de la réforme dite radicale de Zurich (1525) se sont réfugiés sur les montagnes de l’Evêché de Bâle dès le 16ème s. A cette époque sa partie sud, l’actuel Jura bernois,
était agitée par l’acceptation de la réforme conduite par Guillaume Farel dès 1528, car ces changements ont rendu sensible la présence des anabaptistes. Berne demandait à étendre ses persécutions
sur le territoire du Prince-Evêque qui, de son côté, n’avait pas la même approche. Ainsi les menaces diminuent et augmentent selon les périodes, mais dans la durée les anabaptistes ont bénéficié
des conflits entre opposants et partisans à leur présence. En 1738 le maire de Tavannes, Abraham Saunier, envoie au Prince-Evêque une liste de 27 personnes anabaptistes résident sur le territoire
de la Commune. Durant une période de 300 ans (17e jusqu’au début du 20e siècle), les anabaptistes de la région connaissent beaucoup de mouvements. Des familles arrivent par vagues suite aux
répressions bernoises, alors que d’autres partent vers l’Alsace ou le Nouveau Monde. Seule une minorité reste sur place. Au début du 20e s. les anabaptistes-mennonites de la région de Tavannes
sont majoritairement membres des Assemblées du Petit-Val (Moron) ou du Sonnenberg (Tramelan).
L’histoire de l’Eglise évangélique mennonite de Tavannes (EEMT) débute une vingtaine d’année avant sa constitution. Trois couples visionnaires décidèrent de construire une salle attenante à une
maison familiale, permettant de réunir une centaine de personnes. Avec le soutien d’autres bénévoles les travaux ont débuté en août 1967 pour s’achever en novembre 1969. Durant la réalisation les
Eglises mennonites du Petit-Val (Moron) et du Sonnenberg (Tramelan) sont devenues propriétaires de l’immeuble à parts égales. Le lieu de culte a été inauguré le 14 décembre 1969.
Au départ, un culte avait lieu toutes les 2 semaines, en alternance avec les rencontres de l’Ecole du dimanche, la langue allemande constituait alors la règle. Par la suite, les personnes qui se
réunissaient à Tavannes ont pris conscience de la nécessité d’un passage progressif vers la langue française, à la fois pour rejoindre les générations plus jeunes ainsi que les gens du lieu. Lors
du passage vers trois cultes mensuels, il a fallu trouver des locaux complémentaires pour l’Ecole du dimanche. Grâce à l’accueil d’autres institutions établies dans le village, différentes
solutions ont été trouvées entre 1979 à 1988. D’abord avec l’Ecole d’agriculture (au bas de la même rue jusqu’en 1981 et à la rue H.-F. Sandoz jusqu’en 1988), puis avec le Centre de pédagogie
curative du Jura bernois (CPSJB) jusqu’en 1993. Dès 1985 la nouvelle grille du programme des cultes comportait 2 cultes français, 1 culte allemand et un culte bilingue en famille le 4ème dimanche
du mois.
Les réflexions et travaux de diverses commissions en vue de constituer une communauté indépendante à Tavannes ont débuté en 1983. Cela simplifiait aussi les démarches pour l’agrandissement des bâtiments, pour lesquelles le groupe de travail local bénéficiait déjà des compétences nécessaires. Durant le processus les deux Eglises-mères de Moron et du Sonnenberg ont encouragé la constitution d’une nouvelle Eglise locale. Les étapes décisionnelles et de mise en œuvre ont été supervisées par le Bureau de la Conférence Mennonite Suisse (CMS). Le 25 août 1989, 38 personnes ont décidé le principe de constituer l’EEMT. Quelques semaines plus tard, 71 personnes demandaient leur adhésion comme membres et 21 personnes désiraient figurer sur la liste des amis de l’Eglise. Le culte inaugural a eu lieu le 26 novembre 1989, une plaquette fut éditée à cette occasion.
La constitution de l’EEMT a créé une dynamique communautaire favorable, chaque année des personnes et des familles distancées se sont approchées. Ces nouveaux besoins conjugués à ceux de l’Ecole
du dimanche ont conduit au projet d’agrandissement du lieu de culte, avec l’installation de salles annexes pour le travail parmi la jeunesse. La célébration de dédicace de ce nouveau bâtiment a
eu lieu le 29 août 1993.
Au fil du temps les changements n’ont pas manqué ! A commencer par le choix linguistique. Dès la constitution de l’EEMT, toutes les activités ecclésiales se sont déroulées en français, à l’exception d’une rencontre bimensuelle d’étude biblique et de prière qui se tient en allemand jusqu’à présent.
Des changements importants ont eu lieu pour le chant dans l’assemblée, les recueils se sont succédé. Les anciens cantiques, entonnés durant des décennies pour ne pas dire durant des siècles, ont
progressivement fait place à des compositions plus récentes, avec la remarque que des personnes de l’assemblée et de la région font partie des compositeurs connus dans le monde francophone. Il en
est de même pour l’accompagnement musical, l’harmonium a été remplacé par le piano, auquel se sont ajoutés d’autres instruments. Des efforts ont été faits pour introduire ces divers changements
en douceur dans le respect des uns et des autres. A ce stade plusieurs équipes conduisent les temps de louange durant les célébrations, les personnes responsables de ces équipes se consultent
périodiquement pour coordonner les priorités pour le chant communautaire.
Le travail parmi la jeunesse avait de l’importance avant même la constitution de l’Eglise. Au début des années 2000, toute la structure de l’Ecole du dimanche a été repensée pour développer des
concepts pédagogiques plus actuels, également pour offrir une continuité sur le plan relationnel et adapté à chaque groupe d’âge, allant de la petite enfance jusqu’au groupe de jeunes. Ce domaine
appelé « Ministère Jeunesse » (MJ) est conduit par une petite équipe qui associe une quarantaine de personnes à la collaboration des programmes.
L’Eglise a placé des priorités pour développer un style communautaire qui favorise l’évangélisation. Que ce soit par les cours Alphalive, les relations professionnelles, les temps de prière
spontanés offerts à la fin de chaque culte, les apéritifs mensuels, les entretiens de relation d’aide, etc. Autant de démarches pour créer des ponts relationnels qui portent des fruits à
l’adresse de personnes nouvelles qui s’approchent de Dieu, parfois rejoignent la communauté.
Depuis les revendications démocratiques dans les pays arabes et les nouvelles vagues de réfugiés arrivés en Suisse, de nombreuses familles chrétiennes et musulmanes notamment d’Egypte, de Syrie
ont été placées par les autorités dans la région (depuis 2012). Par différents contacts individuels des membres de l’EEMT avec ces personnes arabophones ont rendus la communauté sensible à leur
présence. C’est ainsi que l’EEMT a commencé à proposer des célébrations spéciales avec repas tous les 2 ou 3 mois, elle bénéficie pour cela d’aides occasionnelles d’autres Eglises arabes,
notamment celle de Berne. Depuis 2013 toutes les célébrations dominicales de l’EEMT bénéficient d’une traduction simultanée en arabe.
La vie communautaire met de l’importance sur chaque groupe d’âge. Une préoccupation importante est de rejoindre les différents besoins. Lors des cultes des apports de qualité sont recherchés
(introduction, témoignages, prière de bénédiction pour les étapes de vie, prédication, temps de prière, etc.). Tous ces domaines connaissent des développements constants, alliant à la fois les
richesses et les bases inébranlables de l’Evangile et les besoins actuels des personnes. De manière consciente l’EEMT offre peu d’activités en semaine, l’idée étant de favoriser la vie de
famille, les engagements dans les milieux professionnels, le développement des groupes de maison, les offres spécifiques liées à des intérêts particuliers.
Depuis une dizaine d’années, l’EEMT souhaite trouver de nouvelles infrastructures en raison du manque de place. Une solution est en voie de réalisation par l’achat d’un ancien arsenal mis en
vente par l’Armée suisse, à ce sujet les décisions ont été prises en 2013. Le déménagement est prévu en 2018. Ce projet sera en mesure non seulement d’offrir les infrastructures nécessaires
actuellement, mais aussi les espaces pour les développements futurs. L’EEMT envisage développer un travail social en faveur de personnes défavorisées de la population régionale.
L’Eglise souhaite encourager un maximum de personnes à trouver une place où elles peuvent découvrir leurs dons, servir en équipe et participer à leur tour à la formation de nouvelles personnes. Les principaux organes nommés par l’Assemblée générale des membres sont le conseil (mission exécutive) et le groupe de la pastorale formé par l’ensemble des ministères (anciens, diacres, pasteurs, responsables des équipes de louange et responsables du MJ et groupe de jeunes). S’ajoutent les équipiers du ministère jeunesse (env. 40 personnes), le groupe de travail missionnaire (5 personnes), etc.
Dès sa constitution l’EEMT a fait appel à un pasteur, au début il était engagé à raison de 60% et à 100% dès 1993. En 1998 elle a fait appel à un 2ème pasteur, d’abord à mi-temps puis 100% aussi.
Cette collaboration entre pasteurs, qui visent aussi à faciliter les engagements et services, se prolonge encore à l’heure actuelle. A tour de rôle les employés ont été « prêtés » à temps partiel
à d’autres organismes ou institutions (Conférence Mennonite Suisse, Alliance Evangélique Suisse, Eglise de la FREE, Familles de Foi, intercession au Palais fédéral). Il est à relever que
plusieurs stagiaires ont bénéficié d’une formation pratique à l’EEMT.
L’orientation théologique se veut fidèle à la Bible, Parole de Dieu. L’enracinement se situe clairement dans l’héritage anabaptiste-mennonite, sans pour autant idéaliser les origines anabaptistes. Nous sommes d’abord chrétiens et ensuite incorporés dans une famille dénominationelle. Il y a une volonté claire d’être une Eglise ouverte et accueillante pour des personnes qui viennent avec un autre arrière-plan. En ce qui concerne les styles de piété, dès sa constitution l’EEMT associe les styles de type classique et charismatique. L’expérience démontre que ce choix est apprécié par la grande majorité des personnes qui sont en relation avec l’EEMT.
En tant qu’Eglise issue du mouvement anabaptiste, nous n’avons pas de liens officiels avec l’Etat. Cependant comme les autres Assemblées mennonites, nous sommes reconnus comme étant une association d’utilité publique. Les membres et amis sont encouragés à s’impliquer dans la société selon des formes variées. Plusieurs membres font partie des conseils exécutifs des communes environnantes.
Les collaborations sont nombreuses à tous ces niveaux. Le témoignage commun des chrétiens a une portée importante, avec le souhait de souligner davantage ce qui unit plutôt que ce qui divise.
Sur le plan local, les pasteurs de l’EEMT rencontrent les collègues des autres Eglises libres, des Paroisses réformée et catholique. Une à deux fois par année des célébrations ou rencontres
communes sont organisées (célébrations communes en début d’année, soupe de Carême,…). A Tavannes les Eglises issues de la Réforme gère ensemble le magasin « Diapason », librairie et musique
chrétiennes.
Sur le plan régional l’EEMT participe aux activités de la Pastorale Mennonite Romande, aux rencontres pastorales regroupant les ministères des Eglises évangéliques de professants, cela vaut
également pour les ministères parmi les enfants et les jeunes. Des collaborations ont lieu au sein d’activités diverses, telles que Chrysalide (enfants et jeunes), Soirée de louange de
Reconvilier (rencontre mensuelle de chant et évangélisation/édification), Table couvre-Toi (distribution de produits invendus à des pers. pauvres), etc.
Sur le plan national, l’EEMT est membre de la Conférence Mennonite Suisse (CMS) donc impliquée dans les projets coordonnés sur le plan de la dénomination (mission, entraide, publication,
stratégie). Elle est membre aussi du Réseau évangélique suisse (RES) qui coordonne les actions et la présence des évangéliques en général dans l’espace public.
A l’occasion du culte inaugural du 24.08.1989, l’EEMT a publié une plaquette bilingue « Genèse de l’Eglise locale – Der Weg zur Gemeindegründung » (1989, 48 p.). Depuis plusieurs années l’EEMT publie son bulletin bimestriel « Belf’onde » à l’attention de ses membres et amis. Cette publication présente le programme par période de deux mois, elle offre également de la place pour les échos sur de récents événements, une interview avec une personne de la communauté, etc.
Ernest Geiser